Canalblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Grands Nords

Grands Nords
Publicité
30 janvier 2007

Comme des mammouths

mammoth2photo : ressources naturelles Canada

Un livre marque le début de mon voyage sur les chemins des peuples nordiques : Le destin du mammouth. Claudine Cohen raconte l'évolution d'une science relativement récente : la paléontologie.

L'auteure rappelle à quel point c'est une science en cours d'évolution permanente, étant donné qu'elle dépend des artefacts trouvés au fil du temps pour apporter de nouvelles connaissances sur les époques passées. Idem pour la découverte des autochtones nordiques, non ?

La découverte des peuples nordiques, de leurs migrations, de leurs territoires, pourrait être comparée à la découverte des os de mammouths : plus la glace fond, plus on trouve d'objets, plus on affine les connaissances, moins on peut être affirmatif mais plutôt amené à être modeste face à l'ampleur des migrations des peuples nordiques à travers des territoires qu'ils ont parcourus dans tous les sens.

Voici quelques éléments de comparaison entre des questions soulevées par les recherches paléontologiques et des questions que je me pose au sujet des gens du Nord :

1 - des origines des autochtones
Comment affirmer que les Inuits et les Amérindiens sont tous passés par le détroit de Béring pour rejoindre le continent américain ? N'existerait-il pas d'autres voies, navigables notamment, utilisées par des peuples asiatiques pour coloniser l'Amérique ? Ces peuples formaient-ils déjà des groupes homogènes ou bien auraient-ils pu se mélanger au fil de leurs rencontres ?
Le mammouth vient soulever le même genre de question : on pensait, jusqu'à présent, que c'était un animal du froid. Or, C.Cohen rappelle que les toutes récentes recherches sur l'ADN du mammouth "ont conclu que les mammouths sont génétiquement plus proches des éléphants d'Afrique que ceux d'Asie.../... Sur le terrain, des fouilles conduites au Maroc [] ont mis au jour le plus vieil ancêtre des Proboscidiens [] qui était de la taille d'un petit chien, avait déjà une trompe, et vivait il y a 59 millions d'années"

2 - de l'interprétation de l'histoire des autochtones
Au départ, il n'y a certainement pas un groupe donné de telle population, mais il y a sûrement des ramifications en forme d'arbres : est-ce qu'il y aurait plusieurs arbres humains en différents points du globe qui seraient à l'origine des groupes autochtones d'aujourd'hui ? J'en suis sûre. L'histoire du mammouth est un bon exemple de cette diversité des origines. Non seulement il y a eu des ossements de mammouths découverts dans les régions arctiques, mais il y en a eu aussi en Amérique, en Sibérie, en Afrique, au Mexique et... dans le sous-sol de la ville de Londres. Vous me direz qu'il y a 450 000 ans, des boeufs musqués et des ours maritimes vivaient près de la Méditerranée actuelle, alors !!

3 - mythes expliqués
Les mythes autochtones ont tous une connection avec la vie sur le terrain. Une méconnaissance fondamentale de la vie autochtone vient de cette méconnaissance de l'existence quotidienne, entraînant une incompréhension de certains mythes.
Prenons le cas du mammouth de la Sibérie. Les autochtones ont toujours vu émerger du permafrost des restes de cet animal. Ils en ont fait le commerce avec la Chine depuis le XVIe siècle, au moins, selon les premières indications d'explorateurs européens. Les Arabes mentionnent des voies commerciales de l'ivoire sibérien entre le Nord et la Chine depuis le IXe siècle.
Mammouth est un mot d'origine sibérienne. Les autochtones n'en ont jamais vu de vivant et ne se rappellent pas en avoir jamais vu un vivant. Pour les Iakoutes, le mammouth apparaît comme "une sorte de rat géant qui fuit la lumière du soleil et vit sous terre, où il fraye son chemin à l'aide de ses énormes cornes, faisant trembler la terre et soulevant des collines sous son passage. Lorsqu'il parvient à la lumière, il meurt, et c'est pourquoi on trouve ses restes sur les bords des fleuves..."

4 - des contacts entre nordiques et non-nordiques
J'ai souvent pensé que les rapports entre peuples du Grand Nord et non-nordiques étaient relativement récents, aux alentours du XIXe, voire au début du XXe siècle. Le parcours du mammouth sibérien m'apporte un autre éclairage : non seulement, comme je viens de le dire, le commerce de son ivoire est bien ancré depuis le Moyen-Age européen, mais les expéditions russes et européennes pour trouver ses os se multiplient depuis la conquête de la Sibérie, en 1579.
J'avais une image vieillotte d'autochtones sibériens, repliés sur eux-mêmes, jusqu'au début du XXe siècle. Alors que les données sur la conquête des os de mammouths me montrent des expéditions qui se multiplient depuis le XVIIe siècle, un commerce entre Asiatiques très actif depuis de nombreux siècles sans que les Blancs aient quoi que ce soit à voir dans ces voies commerciales ancestrales.

5 - Sibérie versus Alaska
Les contacts entre autochtones nordiques et non-autochtones apparaissent comme des faits bien documentés concernant la Sibérie depuis, finalement, le IXe siècle, puisque les Arabes mentionnent le commerce d'ivoire de mammouth sibérien vers la Chine, la Perse et la Turquie.
En revanche, l'Alaska et le Nord-Ouest du continent américain sont reconnus depuis peu de temps, par conséquent leurs populations sont reconnues et connues depuis peu de temps, on va dire depuis le XIXe siècle.
Le mammouth nord-américain s'est laissé dénicher quelque part en Alaska, par des explorateurs qui cherchaient le passage du Nord-Ouest (voir le récit de Otto von Kotzebue "Voyage de découverte dans les mers du Sud et le détroit de Béring dans les années 1815-1818"). Un Anglais trouve également, en 1816, des os de mammouth sur les côtes de l'Alaska.
Les Amérindiens et Inuit de ces régions fabriquaient des outils et ustensiles dans de l'ivoire de mammouth. Les chercheurs d'or du Yukon faisaient un profit non négligeable de l'ivoire de mammouth qu'ils dégageaient lors de leurs fouilles.
Début XXe siècle, avec l'arrivée des Blancs en Alaska, des boutiques proposent des "souvenirs" à base d'ivoire : des presse-papiers, des figurines, des bibelots.
"Les marchands de Skagway obtiennent la plus grande partie de leurs défenses dans la région du Klondike, tandis que les marchands de Nome se procurent l'ivoire à Eschscholtz Bay, la rivière Buckland et dans les localités de la rivière Kobuk."

6 - migrations des peuples nordiques
Où j'en reviens à mes questions sur des origines et l'ampleur des migrations autochtones, que ce soit par le commerce ou par la recherche de terres riches en ressources alimentaires.
Là encore, le mystère du mammouth est une source de comparaison de questionnement. Voici un extrait du livre : "Les voyages du mammouth ressemblent étrangement à ceux des premiers hommes. Comme l'homme, le mammouth fut un grand voyageur [] Les premiers humains qui, venus d'Asie, pénétrèrent en Amérique par le détroit de Béring alors à sec, il y a quelque 11 000 ans, étaient-ils guidés dans cette migration par la poursuite des hordes de mammouths ? [] On trouve en effet, de l'Alaska au Mexique, les traces de la culture de Clovis, et leurs fameuses pointes cannelées découvertes dans quelques sites de chasse sont les témoignages de la vie de ces premiers hommes qui peuplèrent le continent américain ; récemment, des archéologues ont pu mettre en évidence des paillettes de sang de mammouth séché sur des pointes de flèches découvertes sur les sites les plus anciens de l'Alaska et de la côte ouest de l'Amérique du Nord..."
Lorsque j'ai habité à Yellowknife, j'ai lu certaines parties de l'histoire du peuple Dènè. Selon la culture orale, j'ai entendu que ce peuple habite le Nord-Ouest américain depuis "des temps immémoriaux", et selon des découvertes archéologiques, "depuis au moins 30 000 ans".

La fin de cette lecture me laisse trois certitudes :
- on ne connaît finalement pas bien les migrations et les origines des peuples nordiques
- on a une image du Grand Nord plutôt fausse : ce ne sont pas de grands espaces vierges, ce sont de grands espaces parcourus par une multitude de réseaux d'échanges millénaires
- on peut affirmer que les peuples nordiques furent de tout temps des commerçants

Le mammouth aura la conclusion finale, car il nous apporte encore une fois un mystère de plus à résoudre, comme il en reste tant à résoudre au sujet des peuples nordiques : "Mais voici que, de manière spectaculaire, une nouvelle découverte relance le débat : en 1993, des chercheurs russes rendent compte de la découverte, dans l'île de Wrangel, à 200 km au large de la Sibérie orientale, de vestiges de mammouths éteints il y a 3 700 ans... - à peine 1 700 ans avant l'ère chrétienne ! C'est allonger de plus de 6 000 ans la survie de cette espèce, que l'on croyait disparue de la surface de la Terre depuis la fin du Pléistocène."

Publicité
Publicité
22 décembre 2006

Une curieuse des peuples nordiques

Yellowknife Yellowknife, hiver 2002, Canada, 62°latitude nord

Après un an et deux séjours dans le Grand Nord, au Canada et en Finlande, j'ai réalisé un voyage virtuel autour du 60e parallèle pendant une autre année. Quel plaisir de découvrir des peuples et des cultures aussi diversifiés !

Justement, ce dernier voyage m'a amenée à me poser des questions sur ces humains nordiques. Par exemple :
- j'ai croisé des populations qui sont passées du néolithique à l'âge électronique en l'espace de 50 ans, comment en sont-ils arrivés là ?
- des groupes ont migré puis ont disparu, telle une civilisation qui a laissé des peintures rupestres sur les bords du lac Baïkal, comment cela s'est-il fait ?
- lorsque j'étais virtuellement parlant sur l'île Nunivak, à l'ouest de l'Alaska, je me suis trouvée au carrefour de plusieurs peuples : Tchouktches, Inuit, Cu'pig, Dene, comment ces habitants se sont-ils côtoyés, comment ont-ils fait leur échanges s'il y en a eu ? D'autant que chacun se définissait, dans sa propre langue, comme un être humain, c'est-à-dire comme un être parlant et se tenant debout. Y en avait-il de plus humains que d'autres selon leurs schémas sociaux ?

Ma quête de connaissances sur ces habitants est soutenue par une curiosité de plus en plus débordante. Des noms de peuples tourbillonnent dans mon esprit tant ils sont nombreux ; des techniques ancestrales me paraissent d'une ingéniosité extraordinaire et me fascinent ; l'adaptation obligée et parfois très rapide de groupes nordiques à des conditions économiques inconnues voici moins d'un demi-siècle m'apparaît comme une prouesse. Leur histoire, leurs histoires, m'interpellent, j'ai envie d'en savoir davantage sur :
- leur passé
- leurs lieux de vie
- leurs liens, leurs rencontres, leurs échanges et/ou mélanges

Bref, me voici au début d'une nouvelle expédition. Encore une fois, pour 2006-2007, elle sera virtuelle (par internet), intellectuelle (par des livres), relationnelle si des entretiens s'avèrent possibles. Par sauts de puce, sans itinéraire décidé à l'avance, je dresserai alors une carte sur les quelques chemins nordiques que j'aurai parcourus, depuis les temps anciens jusqu'à aujourd'hui.

Bonne visite à toi qui viens sur ce blog. N'hésite pas à prendre la route dans ce site avec tes commentaires, tes trouvailles, tes émerveillements ;-)

Publicité
Publicité
Publicité